La mortalité périnatale dans l’espèce féline
La mortalité périnatale existe dans toutes les espèces, y compris l’espèce humaine. Les progrès de la médecine et la médicalisation de l’accouchement chez la femme ont permis de réduire considérablement les décès de très jeunes enfants dans l’espèce humaine. Chez le chat, cette mortalité du très jeune chaton reste encore un cas fréquent.
On définit la mortalité périnatale chez le chat comme l’ensemble des décès survenant lors de la mise bas ou dans les 21 premiers jours de vie des chatons. Les statistiques vétérinaires (données UMES) estiment à 10% la proportion de chatons morts nés et à 20% de plus la proportion de chatons décédant dans les 21 jours suivants.
Hélas, il est encore extrêmement difficile de déterminer les cause de cette mortalité, et le plus souvent, les autopsies réalisées sur les chatons décédés ne révèlent aucune anomalie. Néanmoins, quelques pistes peuvent être évoquées. On distinguera les causes liées au chaton lui-même des causes liées à un manque de contrôle du milieu extérieur.
L’éleveur, mais aussi le simple propriétaire d’une chatte gestante, fut-elle de gouttière, se doit d’être capable de réagir face à un problème. C’est pourquoi il faut être à même de reconnaître un chaton faible. Les signes de faiblesse chez le chaton sont aisément repérables : cris, gémissements incessants, anorexie (le chaton ne s’alimente pas), isolement de la fratrie. En pratique, le plus simple est de peser les chatons tous les jours à la même heure et de calculer le gain moyen quotidien ou GMQ, grâce à l’opération suivante :
Un GMQ inférieur à 7g/jour sur deux jours est un signe d’alerte.
Afin d’éviter aux chatons d’atteindre cet état de faiblesse généralisée fort difficile à guérir, des précautions peuvent être prises. Il est impératif de veiller à placer la mère et ses chatons dans un bon environnement, y compris émotionnel. Une mère stressée s’occupera mal de ses chatons, et des chatons placés en condition de stress profiteront moins bien de l’apport nutritionnel du lait maternel.
La prise du « premier lait » ou colostrum est fondamentale. Durant les premières quarante-huit heures, le chatons est incapable de digérer les anticorps maternels contenus dans le lait et qui passent alors la barrière intestinale du chaton, lui conférant ainsi une immunité contre les pathogènes. Plus tôt ce colostrum est ingéré par le chaton, meilleure sera sa protection immunitaire. Il est possible de congeler le colostrum et de le conserver au congélateur durant six mois : certains éleveurs traient ainsi leurs chattes dans les 48 premières heures, afin de récolter le précieux liquide pour les portées à venir. Un colostrum artificiel est également disponible chez de nombreux vétérinaires.
Le deuxième point auquel l’éleveur devra veiller est la température du nid. Durant la première semaine, celle-ci devra être comprise entre 31°C et 34°C. Il est fondamental que les chatons soient maintenus à une bonne température car ils sont incapables de se thermoréguler, c’est-à-dire de réguler leur propre température corporelle, et ils risqueraient donc, dans un environnement trop froid, de tomber en hypothermie. Sans en arriver à ce cas extrême, il faut également savoir que la digestion chez le chaton ne se fait que si celui-ci est maintenu à une température suffisante : en dessous de 34°C, le chaton ne digère plus ! le lait non digéré et stagnera dans l’estomac sans profiter au chaton, qui mourra alors de faim.
Afin de maintenir le nid à une température appropriée, plusieurs moyens peuvent être employés. Le meilleur reste bien-sûr la mère. Si celle-ci s’occupe correctement de ses chatons, il ne sera pas nécessaire de palier à une baisse de température du nid : elle y veillera d’elle-même en apportant sa propre chaleur corporelle. Dans le cas contraire, il faudra user d’instruments chauffant, comme un tapis chauffant, une lampe infrarouge – attention, cette lampe doit être placée suffisamment en hauteur pour ne pas dessécher les chatons ! – ou une simple bouillotte, que l’on peut fabriquer très simplement en mettant de l’eau bouillante dans une bouteille en plastique, que l’on enveloppera dans une serviette de toilette.
Le troisième point auquel il faudra veiller est le taux d’humidité. Celui-ci devra être compris entre 55 et 65%. Attention donc si vous habitez sous les tropiques (Martinique, Guadeloupe) ou en zone humide, ou à l’inverse si vous avez un chauffage électrique qui dessèche l’atmosphère.
Je n’ai volontairement pas abordé ici les causes liées à la mère. Il apparaît évident que la bonne santé de la chatte est capitale pour une portée réussie. Il faut donc penser aux vaccinations, vermifugations et vérifier également l’absence de tartre sur les dents de la chatte qui s’en sert pour couper les cordons. On pensera à passer un peu de désinfectant, type bétadine ou alumine, sur les cordons des chatons un fois ceux-ci coupés : demandez conseils à votre vétérinaire.
La mortalité lors de la mise-bas est beaucoup plus difficile à contrôler. La réanimations d’un chaton qui ne respire pas est délicate, mais pas infaisable. Un mouche-bébé pourra être utilisé pour vider les poumons et instiller de l’air à celui-ci. Un point d’acupuncture, positionner au deux tiers du nez donne également d’excellent résultats.
Les deux derniers points qu’il conviendrait d’aborder lorsqu’on parle de mortalité périnatale sont la mortalité pour cause de maladie infectieuse (herpes virus, calicivirus, etc…) et la mortalité lié à une incompatibilité entre le groupe sanguin de la mère et celui des chatons, incompatibilité qui s’exprime par l’érythrolyse néonatale. Cette destruction des globules rouges des chatons est dus à l’attaque de ces globules rouges par les anticorps contenus dans le lait maternel. Pour éviter l’érythrolyse néonatale, il suffit d’écarter les chatons de groupe sanguin B de la mère de groupe A pendant les 48 premières heures. Des tests sont disponibles aux adresses internet suivante pour connaître le groupe sanguin de vos reproducteurs : www.rapidvet.com, www.medical-solution.ch, et www.diamed.ch. Le site du Dr Diane Addie (http://www.dr-addie.com) vous donnera également des informations sur les groupes sanguins et leur répartition au sein des différentes races félines.
Enfin, si malgré toutes vos précautions vous perdez un chaton, sachez qu’il est possible de faire réaliser l’autopsie de ce dernier à l’UMES, à l’Ecole Nationnale Vétérinaire de Maison-Alfort.
Myriam Gullaud
D’après la conférence UMES du 31 octobre 2005